Ces temps, on parle beaucoup de désobéissance civile, ce qui n’est pas pour me déplaire! Je vais relire Thoreau1, quand il fera trop moche dehors, mais l’anarchiste qui sommeille en moi (si! si!) se réjouit de voir des jeunes bloquer la circulation ou occuper les locaux d’une banque ou d’une assurance pour alerter sur l’urgence climatique. Des gens courageux ont brûlé des McDo, manifesté lorsque cela était interdit, fauché des champs en culture OGM, se sont interposés entre baleines et canons, ont accueilli chez eux des personnes “illégales”… Rappelez-vous Mandela, Rosa Parks, Aaron Swarz 2, Gandhi, voyez les manifestants de Hong Kong, les lanceurs d’alerte. Si, en plus, il y a une dose d’humour, alors là, je jubile franchement!
La désobéissance civile est un devoir moral quand la cause le justifie, elle est un moyen de protestation ultime (même) au sein d’une démocratie, si elle est non-violente, publique et que ses auteurs en acceptent les conséquences. Elle est la légitimité contre la légalité. Déranger, alerter, s’exprimer avec les moyens du bord, cela me paraît être la plupart du temps “du côté de la vie”.
C’est quoi le rapport avec le jardin, me direz-vous ? Au jardin, il est aussi intéressant de se poser la question de la désobéissance, qui, par essence, implique qu’il y aie, au préalable, de l’obéissance. Et en effet, combien de règles, d’usages, d’atavismes, de traditions et d’habitudes ? Arbres taillés, potagers désherbés, gazon tondu, feuilles à l’automne ratissées, légumes associés, couleurs et textures arrangées dans un massif de fleurs ! J’apprécie certes, le bel agencement dans un jardin mais, toutes les règles sont faites pour être transgressées au moins de temps en temps: ça nous rafraîchit un peu et ça ne fera certainement pas de mal à la nature, qui se portera bien mieux si on lui foutait un peu la paix! Se laisser aller à la transgression nous ramènera, le jardin et le jardinier, du côté de la vie.
Je ne veux pas ici vous donner les règles de la désobéissance, ce serait un paradoxe parfait, mais vous inviter à être un peu paresseux, un peu créatifs, ou encore à vous poser la question: qu’est ce qui se passerait si je ne faisais pas ce que j’avais prévu de faire ? ou si je faisais différemment? Bien sûr, parfois on se plante, et alors ? Il s’agit d’apprendre à apprendre et à désapprendre avec jubilation, à créer son propre modèle adapté à son environnement particulier, en dehors des conventions et des habitudes.
En dehors de son propre jardin, on peut désobéir en colonisant par la culture des espaces délaissés ou non entretenus ni jardinés3, recycler des végétaux, récupérer du matériel inutilisé par d’autres, échanger des graines. On peut lancer des bombes de graines (“guerilla gardening”4), créer des espaces collectifs, c’est aussi de la désobéissance!!
La désobéissance fertile5 est une jolie expression certes, mais qui nous invite à sortir de notre zone de confort et à faire confiance à nos intuitions et surtout à la nature. Qui sait ce qui se passera alors?
Recette pour bomber des graines: Mélanger des graines de fleurs avec de la terre argileuse humide. Former des boulettes de la taille d’une balle de ping-pong. Laisser sécher. Lancer dans des espaces en friche, en poussant un grand cri de joie !
Pour terminer, je ne saurai trop vous recommander la lecture du “Petit traité du jardin punk” de Eric Lenoir, Terre vivante, 2019
- La désobéissance civile, 1849[↩]
- militant pour la liberté sur le net[↩]
- par exemple, terrains vagues, fossés, talus, friches, etc. [↩]
- http://guerilla-gardening-france.fr[↩]
- Vocable que j’emprunte à un collectif qui a pour objectif de récupérer terres et forêts pour les placer en “communs” ou en projets écologiques – https://desobeissancefertile.com/ [↩]
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