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Jardiner… plus que jamais

Oui, nous sommes chanceux, nous les heureux propriétaires de jardins, de balcons, d’un bout de terrain quelqu’il soit. Oui, nous pensons à celles et ceux qui sont confinés dans un appartement en ville et oui, quand les récoltes seront venues nous partagerons! Au temps du coronavirus, et de son cortège de souffrances morales et physiques, les jardiniers sont plus que fortunés. Sortir, respirer, écouter les oiseaux que l’on n’a jamais si bien entendu, observer la nature faire son oeuvre sans nous, mettre les mains dans la terre, semer, regarder pousser. En plus, c’est avril, notre mois de résurrection.

Je mets mes sabots de jardin et par une petite mais ensoleillée fricasse matinale, je fais le tour de mon coin de paradis en guettant le moindre changement. Les bruits du monde sont loin, très loin. Je regarderai les courbes d’évolution de la pandémie devant mon café et je me mettrai devant l’ordi pour ma dose quotidienne de télétravail. Je noterai au passage que le Conseil fédéral a décidé d’assouplir la règle afin d’autoriser le commerce de graines et de plantons (bien sûr, en respectant les règles sanitaires, qui soit dit en passant, sont devenues des réflexes, aussi vite que le sentiment de danger nous est tombé dessus). Il semble juste d’éviter les gaspillages de plantons de légumes, de fleurs qui ont été soignés par de vaillants horticulteurs et de servir des jardiniers amateurs qui ne demandent qu’à faire pousser leurs choux. Je ne sais pas si l’autoproduction de légumes par les particuliers a été quantifiée, mais elle n’est sans doute pas négligeable. Produire chez soi, c’est diminuer l’importation de légumes depuis l’étranger, c’est participer à l’autonomie alimentaire du pays, c’est bien sûr consommer des aliments plus sains, pour autant que l’on se passe d’intrants chimiques, évidemment. Mais, la débrouille a un côté bien charmant et donne un sentiment de joie quand on réussit à faire avec moins, à faire plus lentement ou à contourner les difficultés.

Ce matin, par visioconférence, je faisais voir à une amie jardinière du bout du canton, l’état de mes semis de tomates. Elle me montra sa plantation de pommes de terre. Quel drôle de dialogue à distance, nous qui adorons visiter nos jardins, échanger des trucs et des graines, partager nos découvertes et nos astuces. Et l’on se met à s’envoyer des graines ou les poser dans la boîte à lait du voisin, échanger des infos du style: “Tu as vu, à Mézières, y ‘a un gars qui met à disposition des plantons bio?”, ou bien “Eh! y’a un arrivage de terreau à semis chez X, dépêche-toi, y ‘en a pas beaucoup!” ou encore “J’ai fait trop d’aubergines, qui en veut ?” C’est tout un réseau d’échanges d’info ou de matériel qui se crée, de manière organique et spontanée, qui porte haut le drapeau de la générosité et de l’entraide, à l’image des réseaux de solidarité mis en place, très vite au début de la crise sanitaire. Cela participe à me donner espoir, après m’être navrée en constatant les achats de hamster de certains de nos concitoyens (du PQ pour 3 ans !)

Il faudra sans doute beaucoup de temps pour décrire ce qui nous arrive, pour comprendre et digérer cette crise sans précédent, mais, et c’est un truisme que de le dire, nous apprenons beaucoup et très vite: la solitude, la lenteur, le temps long, la peur, la solidarité, l’attention aux autres, la générosité et j’en passe…

Au jardin, nous apprenons à ne pas avoir tout ce que souhaitons, nous apprenons à demander et à donner de l’aide. Nous apprenons aussi la gratitude, nous gardons un équilibre mental, parfois précaire, en plantant des arbres ou des radis. Mais, lever le nez de son râteau et regarder le monde derrière notre haie, est un devoir d’humain. Il ne tient qu’à nous, bienheureux jardiniers, de ne pas être des égoïstes confinés dans nos jardins, mais jardiner, ça oui, plus que jamais!

Prenez soin de vous les amis, jardiniers ou non !

Un petit coup de blanc ?

C’est l’hiver… non, je vous le dis au cas où quelque chose vous aurait échappé? Fin janvier, au verger, les arbres ont été taillés, mais si l’on veut pouvoir manger quelque chose cet été, il faut traiter ! Quoi ? Malédiction ! Outrage ! Vous savez sûrement que les beaux fruits achetés en grande surface ont subi moult traitements chimiques acaricides, fongicides, bactéricides, insecticides (ça fait envie, non ?) pour arriver sur nos tables si réguliers, si parfaits. Ils ont été stockés en frigo pendant des mois, pour conserver leur esthétique tout au long de la saison de vente.

Alors quoi faire pour le jardin familial avec 4 à 10 arbres par exemple? S’armer comme un cosmonaute et gicler à tout-va ? Revenons à de plus sages dispositions… mais quand même, chaque année on se pose la question: quel stratagème inventer pour faire fuir le chancre, la monillose, la tavelure, la mouche Suzuki et autres joyeusetés qui feront de vos promesses de tartes aux fruits, des bides retentissants.

C’est à ce moment de réflexion intense qu’intervient un jeune paysagiste de mes amis, féru de nature naturelle (!) qui me propose de chauler mes arbres fruitiers. Ni une ni deux, je me renseigne, et lui aussi, et nous apprenons de concert l’ancienneté de la pratique et ses effets désinfectants et répulsifs pour les maladies cryptogamiques et contre les larves d’insectes ravageurs. Bon, bon me dis-je, essayons !

Pour mémoire et pour apprendre (rassurez-vous, je ne le savais pas non plus), la chaux, c’est du calcaire cuit à 900 degrés, qui se transforme en chaux vive. En y ajoutant de l’eau, une chaleur bouillonnante se produit et, en fin de processus, on obtient de la chaux éteinte. Ce matériau minéral a été utilisé depuis l’Antiquité pour la construction et les enduits muraux aux propriétés respirantes (un peu comme l’argile). Plus proches de nous, les écuries étaient souvent enduites de ce blanc pur, non pas pour faire joli, mais pour éviter la propagation bactérienne. En arboriculture aussi, la chaux a été utilisée et, peut-être, avez-vous déjà vu un verger aux troncs tout blancs, en vous demandant si le peintre du coin avait des bidons à terminer ? Eh non, pas pour faire joli, là non plus, mais dans un but de désinfection contre les maladies dues à des champignons qui ne ressemblent en rien à des cèpes de Bordeaux. La couleur blanche permet aussi aux arbres de mieux supporter les écarts de température (gel, dégel, coup de chaud).

Bien sûr, le progrès est passé par là, la chaux a été remplacée par le ciment, moins cher à produire, dès le 19 ème siècle. Les fours à chaux ont été éteints, les chaufourniers sont allé pointer au chômage. Pour nos arbres aussi, la chimie a trouvé les solutions !

Mais, nous les amateurs, nous qui voulons vraiment nous passer de la chimie, alors quoi ? Essayons donc le petit coup de blanc ! Pour ce faire, utiliser de la chaux vive (c’est moins cher que les mélanges déjà tout prêts), mais attention, protection des mains et des yeux indispensable, car en ajoutant l’eau pour “éteindre”, la chaux se met à cuire et des projections peuvent blesser l’amateur imprudent ! Une fois bien refroidi, ni une ni deux, on applique le mélange au pinceau sur les troncs, un jour sec et sans vent. Je dois dire que l’effet esthétique est incontestable et je me réjouis déjà des commentaires interrogateurs de mes voisins. Pour les jeunes arbres, autre traitement: mon jeune paysagiste enduit les troncs avec l’argile mélangé à de la bouse de vache bio, si si ! Pour les branches, huile de colza et savon noir !

Est-ce que ça va marcher ? ces efforts vont-il porter leurs fruits (c’est le cas de le dire)? Je vous ferai part de mes observations à la fin de l’été.

Pour fêter l’achèvement des traitements d’hiver, il y a un petit Epesses au frigo dont vous me direz des nouvelles !

Graines militantes, de l’Inde à notre jardin

Quel rapport entre Vandana Shiva, figure indienne très engagée dans la lutte contre les géants de l’agro-alimentaire, et notre petit jardin ? Entre une paysanne du Kerala illettrée mais riche de savoirs ancestraux et moi, femme occidentale, nantie et éduquée ? Entre une autarcie vitale là-bas et une quête d’autonomie légumière ici ?

La réponse pourrait bien se trouver dans ce mot : « graines ».

La majorité de nos voisins de chariots coopératifs ignore combien de sortes de pommes existent en Suisse. Fruit Union Suisse recense 1000 variétés dont seulement moins de dix  constituent l’essentiel de la production de pommes de table. De même, sur les dizaines de variétés de pommes de terre existantes, seules une infime partie arrive dans nos assiettes. 

Et qui connaît vraiment la portée du commerce mondial des semences monopolisé par quelques multinationales ? Car au-delà de la mainmise sur les graines, c’est le sol, la diversité du Vivant et l’avenir alimentaire de tous qui sont menacés.

Dans le domaine des céréales, les grains anciens ont été progressivement évincés par des blés modernes hybridés souvent stériles. Ce qui empêche la reproduction des semences par le paysan, en le plaçant dans une situation de dépendance économique. De plus, ces nouveaux blés sont plus pauvres en protéines et bien plus riches en gluten, gage de plus de productivité !

En Inde, en Afrique, en Amérique du Sud, les paysans ont été ainsi peu à peu privés de leurs semences céréalières traditionnelles et placés sous le joug des grands semenciers qui leur imposent les variétés « autorisées » qu’eux seuls sont à même de leur fournir, interdisant au passage toute reproduction libre des semences. C’est ainsi qu’en Afrique, le manioc a été très souvent remplacé par du riz importé d’Asie, alors qu’au Mexique, les variétés traditionnelles de maïs servant à faire la tortilla, aliment de base, ont été remplacées… par des maïs américains destinés initialement aux animaux !

Et ce ne sont pas seulement la diversité alimentaire et les cultures traditionnelles qui disparaissent, mais aussi les savoirs-faire agricoles, et notamment ceux des femmes… 

Vandana Shiva

Un autre lien apparaît alors : tout comme les graines, les compétences féminines sont dilapidées et dévalorisées. C’est d’ailleurs la base du mouvement « écoféministe » initié, entre autres, par Vandana Shiva. Elle suggère que, comme les femmes indiennes, les femmes occidentales sont aussi dépossédées de leurs savoirs-faire alimentaires et que cela les met dans une situation de dépendance alimentaire. Mais quel rapport avec les graines me direz-vous ?

TOUT ! Car la perte de la diversité (des graines et des savoirs-faire) est un tout et, dans nos jardins, nous avons la responsabilité et le devoir de revenir aux bases, au simple, au non transformé et au non manipulé… 

Les catalogues des grainiers locaux (Sativa, Zollinger et le Grainier en Suisse) témoignent de la richesse (encore) présente de nos plantes et des possibles que peuvent accueillir nos jardins. Honneur à eux ! Ces patrimoines matériels et même immatériels sont vitaux, parce qu’ils sont vecteurs de savoirs, qu’ils maintiennent ou réveillent des traditions ou des identités locales. Et parce qu’ils ouvrent la porte aux liens sociaux. Les granothèques libres et publiques , comme par exemple à la bibliothèque de Vevey, en sont un bel exemple. Ceci dit, produire des graines à une plus large échelle que celle de nos petits jardins demande des connaissances et du savoir-faire, notamment pour ne pas perdre les caractéristiques génétiques des plantes que nous reproduisons (pensons à cet égard aux courges qui s’hybrident très facilement).

Que cela ne ne nous empêchent pas de prélever, conserver, re-semer, donner et recevoir font de nous des militant-es de la diversité et du lien.

Et chaque graine que nous protégeons nous éloigne de la main-mise de l’industrie agro-alimentaire, tout en nous rapprochant de nos sœurs en sari.

Alors semons !

De la désobéissance au jardin

Ces temps, on parle beaucoup de désobéissance civile, ce qui n’est pas pour me déplaire! Je vais relire Thoreau1, quand il fera trop moche dehors, mais l’anarchiste qui sommeille en moi (si! si!) se réjouit de voir des jeunes bloquer la circulation ou occuper les locaux d’une banque ou d’une assurance pour alerter sur l’urgence climatique. Des gens courageux ont brûlé des McDo, manifesté lorsque cela était interdit, fauché des champs en culture OGM, se sont interposés entre baleines et canons, ont accueilli chez eux des personnes “illégales”… Rappelez-vous Mandela, Rosa Parks, Aaron Swarz 2, Gandhi, voyez les manifestants de Hong Kong, les lanceurs d’alerte. Si, en plus, il y a une dose d’humour, alors là, je jubile franchement!

La désobéissance civile est un devoir moral quand la cause le justifie, elle est un moyen de protestation ultime (même) au sein d’une démocratie, si elle est non-violente, publique et que ses auteurs en acceptent les conséquences. Elle est la légitimité contre la légalité. Déranger, alerter, s’exprimer avec les moyens du bord, cela me paraît être la plupart du temps “du côté de la vie”.

C’est quoi le rapport avec le jardin, me direz-vous ? Au jardin, il est aussi intéressant de se poser la question de la désobéissance, qui, par essence, implique qu’il y aie, au préalable, de l’obéissance. Et en effet, combien de règles, d’usages, d’atavismes, de traditions et d’habitudes ? Arbres taillés, potagers désherbés, gazon tondu, feuilles à l’automne ratissées, légumes associés, couleurs et textures arrangées dans un massif de fleurs ! J’apprécie certes, le bel agencement dans un jardin mais, toutes les règles sont faites pour être transgressées au moins de temps en temps: ça nous rafraîchit un peu et ça ne fera certainement pas de mal à la nature, qui se portera bien mieux si on lui foutait un peu la paix! Se laisser aller à la transgression nous ramènera, le jardin et le jardinier, du côté de la vie.

Je ne veux pas ici vous donner les règles de la désobéissance, ce serait un paradoxe parfait, mais vous inviter à être un peu paresseux, un peu créatifs, ou encore à vous poser la question: qu’est ce qui se passerait si je ne faisais pas ce que j’avais prévu de faire ? ou si je faisais différemment? Bien sûr, parfois on se plante, et alors ? Il s’agit d’apprendre à apprendre et à désapprendre avec jubilation, à créer son propre modèle adapté à son environnement particulier, en dehors des conventions et des habitudes.

En dehors de son propre jardin, on peut désobéir en colonisant par la culture des espaces délaissés ou non entretenus ni jardinés3, recycler des végétaux, récupérer du matériel inutilisé par d’autres, échanger des graines. On peut lancer des bombes de graines (“guerilla gardening”4), créer des espaces collectifs, c’est aussi de la désobéissance!!

La désobéissance fertile5 est une jolie expression certes, mais qui nous invite à sortir de notre zone de confort et à faire confiance à nos intuitions et surtout à la nature. Qui sait ce qui se passera alors?

Recette pour bomber des graines: Mélanger des graines de fleurs avec de la terre argileuse humide. Former des boulettes de la taille d’une balle de ping-pong. Laisser sécher. Lancer dans des espaces en friche, en poussant un grand cri de joie !

Pour terminer, je ne saurai trop vous recommander la lecture du “Petit traité du jardin punk” de Eric Lenoir, Terre vivante, 2019

  1. La désobéissance civile, 1849[]
  2. militant pour la liberté sur le net[]
  3. par exemple, terrains vagues, fossés, talus, friches, etc. []
  4. http://guerilla-gardening-france.fr[]
  5. Vocable que j’emprunte à un collectif qui a pour objectif de récupérer terres et forêts pour les placer en “communs” ou en projets écologiques – https://desobeissancefertile.com/ []

Planter des pivoines

Les pivoines sont des plantes magnifiques et faciles à cultiver. Le choix de variétés est immense: les herbacées, qui poussent en tiges depuis le sol et les arbustives, qui s’élèvent en arbustes de 1 à 2 mètres. Les herbacées, comme les plantes vivaces, disparaissent dans le sol en hiver pour renaître au printemps, tandis que les arbustives perdent leur feuillage en automne.

Outre leurs floraisons somptueuses, mais relativement courtes, entre avril et mi-juin, les feuillages, qui se tiennent bien jusqu’à l’automne, structurent agréablement un massif.

On trouve facilement des pivoines en pot dans les jardineries. Cependant, si vous souffrez d’une passion pour ces belles et que vous cherchez des variétés moins communes, il sera nécéssaire d’aller visiter un producteur ou une pépinière spécialisée (voir nos adresses). ll faut compter une vingtaine de francs pour une herbacée et une cinquantaine pour une arbustive. Les hybrides sont plus coûteuses, bien sûr.

Le moment déterminant pour la réussite de vos pivoines est la plantation. Si celle-ci est bien faite, il y a de fortes chances que la belle se plaise et habite chez vous pour 50 à 100 ans. La plantation à racines nues permet de bien contrôler cette étape. Voyez la petite vidéo ci-dessous, réalisée au retour de la pépinière Rivière à Crest:

video

Outre la technique de plantation, le choix de l’emplacement est capital: les pivoines se plairont dans un endroit ensoleillé à l’abri des vents dominants. Elles supportent très bien les froids vifs et les gelées même importantes. Sous nos latitudes, l’idéal est une exposition ouest pour éviter les rayons de soleil tôt le matin en cas de gelées (dégel trop rapide). Le plus important est le sol qui doit être frais, bien drainé, et pas trop lourd.

L’entretien au long cours est très simple : les deux premières années après la plantation, arroser une fois par semaine en période sèche. Par la suite, arroser avant et après la floraison, si le sol est très sec. Désherber le pied de temps à autre permet à la plante d’absorber les pluies sans risque de stagnation d’humidité. Le besoin des pivoines en engrais est modeste : un apport d’engrais organique deux fois par année est largement suffisant. Ajoutez un peu de cendre froide au pied de temps en temps et le tour est joué! On ne taille pas les arbustives, il faut simplement ôter les fleurs fanées. Les herbacées sont simplement rabattues à 10 cm mi-octobre. Franchement, la pivoine est généreuse et peu exigeante, idéale pour un jardinier contemplatif !

Trop chou…

A l’approche de la fin de l’automne, on compte ses amis, ceux qui seront présents les mauvais jours, ceux sur qui on peut compter quand le moral est en berne et le frigo vide. Ceux-là qui seront consolation et réconfort, ceux-là qui nous réuniront autour de la table. Et là, je convoque la courge, la pomme de terre, le poireau et celui que l’on méprise parfois pour de viles raisons: le chou.

Tellement banal, qu’un petit hommage laudateur lui fera justice. Fort d’une trentaine de variétés (cabus, rouge, Broccoli, fleur, Daubenton, Pékin, rave, romanesco, kale, Milan, Kerguelen, crambe, Bruxelles…), le chou (Brassica oleracea) nous régale au long de la saison froide d’innombrables et admirables manières. Le chou est sans doute l’une des premières plantes domestiquée par l’homme, à partir du chou sauvage des côtes l’Atlantique et de l’Europe du Nord. Cette plante, généralement bisannuelle, dont on peut consommer les feuilles ou la tête (la pomme) possède à tort une image de nourriture pauvre et peu raffinée, probablement parce que, du fait de son rendement, de ses capacités de conservation, elle a été une source calorique importante pour les populations paysannes, en complément des céréales.

Aujourd’hui cultivé dans des conditions industrielles, il peut produire jusqu’à 160’000 kilos à l’hectare. Aliment santé, comme on aime le dire ces temps, le kale a fait les choux gras de quelques gourous de l’alimentation saine. Mais franchement, le smoothie de chou kale, ça ne vous réveille pas un mort, mais l’envie pressante de filer dans la chaleur bruyante d’une brasserie alsacienne vous taper une royale accompagnée d’un Gewurztraminer bien frais. Bon à part ça, il est vrai que les choux (avec x) renferment beaucoup d’éléments nutritifs (sels minéraux, vitamines B et C et même des agents anti-cancéreux). Cuit ou en salade, il fait partie des traditions culinaires de bien des pays de l’hémisphère nord: pensons au chou farci des pays slaves, au cole-slaw anglo-saxon, à la choucroute alsacienne et germanique et bien sûr, notre saucisse aux choux! On n’oubliera pas la soupe aux choux, (on devrait plutôt dire les soupes au choux, tant elles sont variées) emblème réconfortant de la cuisine familiale, mais aussi de régimes et de flatulences annoncées. A ce propos, c’est la décomposition des choux  dans le système digestif qui provoque la formation de gaz intestinaux très gênants, en particulier en séance de travail ou lors d’une sieste coquine… Ajouter quelques graines de fenouil ou de cumin à l’eau de cuisson, paraît-il, permet de réduire ces inconvénients odorants.

Savez-vous planter des choux ? Dans un petit potager, il est vrai qu’il prend pas mal de place, mais quelle joie de voir ses larges feuilles s’élancer vers le ciel et les petites pommes du chou fleur, par exemple naître et grossir. Le chou cabus (celui de la choucroute), ne saurait manquer à aucun jardin, tant il est dense et nutritif. De culture assez simple, si l’on prend garde à quelques éléments: d’abord les choux n’aiment pas le sec, donc attention à l’arrosage, en particulier en début de culture. Ils ont besoin d’un sol riche, bien fumé et bien drainé. Gourmands en azote, ils profiterons de venir après des haricots. La distance de plantation est de l’ordre de 40×50 cm, voire un peu plus (moi j’aime bien serrer), en situation ensoleillée. On peut mettre des salades en culture intercalaire et l’associer au céleri, à la laitue, aux betteraves aux tomates. En revanche, on fera chou blanc, si on lui impose la compagnie du fenouil, des navets ou des radis. Idéalement, une rotation de 3 ou 4 ans est bénéfique. Il faut en outre prendre garde à la mouche du chou, à la piéride (papillon jaune très clair) et bien sûr aux limaces. On récolte les choux au fur et à mesure des besoins avant les grandes gelées, plutôt par temps sec et on les conservera en cave. Les cabus seront lacto-fermentés (voir recette plus bas) et régaleront les amis autour d’une choucroute, mais sans se prendre le chou, hein ? Et encore: le chou rouge cuit avec des châtaignes, accompagnera un plat de chasse. Le chou fleur en salade avec quelques cornichons et des oeufs durs émiettés.. bref il n’y a que l’embarras du chou, euh… du choix, pour consommer la divine brassicacée en réécoutant, par exemple, Gainsbourg et son “Homme à la tête de choux” !

Faire sa choucroute: Utiliser des choux cabus en enlevant les feuilles extérieures abimées et gardant le trognon. Couper en fines lamelles ou râper dans un grand saladier. Ajouter 10 gr. de gros sel par kilo de chou. Brasser et presser avec les mains en exprimant le jus du chou. Au bout de 20-30 minutes, mettre en bocal, en terminant par deux ou trois feuilles et le trognon (qui serviront à maintenir les choux dans le jus). Fermer et laisser fermenter 3 semaines avant de déguster. Bête comme chou, non ?

L’éthique au jardin

Il est bon, parfois, de relever le nez de ses plates-bandes et d’envisager ce que l’éthique peut nous apporter, à nous jardiniers. 

Allons donc faire un tour du côté de l’éthique du “care”. Cette éthique pensée par Carol Gilligan dans les années 80, était à l’origine réfléchie pour le domaine des soins, de la dépendance, puis développée autour des questions de genre, de l’éthique des affaires, de la gestion des ressources humaines, etc.  

En envisageant notre rapport à la vulnérabilité, à la fragilité ponctuelle ou permanente, à l’interdépendance, qui sont des conditions ontologiques de l’existence humaine, l’éthique du « care » remet en question  l’utilitarisme économique et  l’idéal d’indépendance. Ce faisant, elle propose un modèle basé sur l’attention à l’autre, la responsabilité, la confiance et l’altruisme. Dans cette perspective, soi et les autres ne sont pas séparés, mais rassemblés dans un entrelacs de relations et de co-responsabilités.

On perçoit déjà ici que cette vision systémique  peut nous amener à réfléchir notre relation collective et individuelle au vivant non-humain, et à la nature dans son ensemble. Si l’on exclut les mouvements qui prônent le retour à une nature sauvage (wilderness), l’éthique du « care » a beaucoup à apporter à ceux qui se questionnent sur la relation humain-nature. En effet, en mettant au centre l’interdépendance au sein du vivant -notion complètement niée par nos sociétés contemporaines-, l’éthique du « care », met en lumière  notre nécéssaire attention et notre responsabilité collective vis-à-vis de la vulnérabilité des écosystèmes, de l’air, de l’eau, de la biodiversité, etc. 

Notre terre étant devenue fragile, à force de cupidité, l’éthique du « care », initialement pensée dans un contexte individuel ou collectif à petite échelle,  fournit de nouveaux éléments pertinents de réflexion sur notre relation à cette vulnérabilité et à la nôtre en tant qu’individus, parties prenantes de ce sytème. 

Il est évident que si nous percevons la nature comme un « non-moi » à disposition de nos besoins, il nous sera difficile d’adopter une posture de responsabilité vis à vis d’elle. On peut tenter de résoudre cette difficulté par l’attention que nous portons vis-à-vis du bien-être des générations futures, ou la souffrance humaine lors de catastrophes liées au climat, à la modification d’un paysage, etc. 

Le « care » « à distance » dans le temps et l’espace,  peut-il motiver les individus à modifier leurs comportements environnementaux ? Peut-il nous aider à tourner le guidon et adopter des attitudes plus responsables et vertueuses ?  De nombreuses recherches en psychologie sociale tentent de répondre à la question de la motivation au changement dans le contexte de crise climatique et des réponses intéressantes sont émises. Par ailleurs, le travail est aussi individuel, dans le sens de la bienveillance à soi-même, au pardon, à l’expression de l’impuissance et de la colère, de la peur, de la peine, (etc.) afin de sortir du déni et des stratégies de protection et entrer dans une dynamique de sollicitude vis à vis de la vulnérabilité de la nature  (voir à ce propos les apports de l’écopsychologie).

L’éthique du « care » qui est une éthique de l’action, distingue 4 phases intimement liées : 

  1. Caring about: constater l’existence d’un besoin et évaluer la possibilité d’y apporter un soulagement direct ou indirect. L’élément éthique est ici l’attention
  2. Taking care of: reconnaître une certaine responsabilité et  déterminer la réponse à apporter. L’élément éthique est la responsabilité
  3. Care-giving:  effectuer un travail effectif de soin qui vise à réduire la souffrance. L’élément éthique ici est la compétence
  4. Care-receiving: reconnaître que le « sujet » de la sollicitude réagit au soin et qu’il possède la capacité à le recevoir. Il s’agit donc de prendre le feed-back de nos actions. Et la boucle recommence au début.

Amis jardiniers, tout cela vous dit quelque chose, bien sûr. Quand vous irez le soir arroser quelques fleurs ou salades assoiffées, enlever quelque herbes indésirables, rappelez-vous de l’éthique du « care ». 

Mais rappelons-nous surtout que le monde ne s’arrête pas à la clôture du jardin et qu’il nous appartient d’exercer notre responsabilité bienveillante sur notre environnement.  


Bibliographie

GILLIGAN C. [1982], Une voix différente, 2008, Paris, coll. « Champs Essais », Flammarion.

LAUGIER S. [2012], Tous vulnérables ? Le care, les animaux et l’environnement, Paris, coll. « Petite Bibliothèque Payot », Payot et Rivages

TRONTO J. C. [1993], Un monde vulnérable : pour une politique du care, Paris, La Découverte, 2009.

Ça va le bocal ?

Le plastique c’est fantastique, disait-on dans les joyeuses années 60. Le congélateur, c’est encore meilleur, bref pour conserver les produits du verger et du potager, rien de mieux. Mais le vent a tourné, les océans sont des mares de plastique et le bocal en verre fait un retour fracassant (surtout quand on le lâche…) dans nos contemporaines cuisines. Et pourtant quelle histoire !

Conserver les récoltes, ne pas souffrir de la faim et ne pas s’empoisonner ont été des préoccupations séculaires pour les humains: salaisons, saumure, conservation dans le sucre ou le vinaigre, fermentation, dessiccation à l’air ou au feu, fumage, beaucoup de solutions ont été utilisées pour garder les aliments. La stérilisation et la mise en conserves sont nées au 19ème siècle après des inventions et découvertes successives de Nicolas Appert, Denis Papin et bien sûr Louis Pasteur. La firme allemande Weck fondée à la fin du 19ème, introduit les fameux bocaux à l’emblème de la fraise et permet la stérilisation du lait, la conservation “en l’état” de fruits, de légumes et de viandes, ce qui révolutionne l’alimentation.

En Suisse, la firme Glashütte Bülach (ZH) est née en 1891 mais c’est juste après la première guerre mondiale, quand la pénurie de bocaux Weck se fait sentir, que le Conseil fédéral d’alors ordonne la fabrication suisse de “bouteille à cuire” à Bülach. Lancée en 1920, la bouteille est close par un bouchon en porcelaine et un élastique en caoutchouc. Le célèbre bouchon en verre avec son étrier en acier, ainsi que le verre vert qui fait la notoriété de la marque sortent en 1924. D’ailleurs, cette couleur si reconnaissable, synonyme de qualité, est due à un manque de matières premières. La firme fait une promotion efficace de son bocal, si bien qu’on trouve dans toutes les cuisines helvétiques.

Pendant la seconde guerre mondiale, les usines de Bülach tournent à fond et proposent des innovations avec de nouveaux diamètres de cols, de nouveaux formats. Avec l’invasion du plastique et l’introduction du congélateur dans presque tous les foyers, la production chute, si bien que la verrerie Bülach ferme en 1972. Associée au groupe Vetropak depuis 1917, (issu lui des verreries de St-Prex), elle est complément démantelée en 2002. Le groupe Vetropack est aujourd’hui l’un des principaux fabricants de verre d’emballage en Europe. Il emploie plus de 3 000 personnes et exploite huit usines de verre en Suisse et en Europe. Pour poursuivre l’histoire, sachez encore que le site de l’usine zurichoise est en pleine reconversion et que, en 2023, un quartier baptisé “Glasi” de 560 appartements et 20’000 m2 d’espace commerciaux verra le jour. Je ne sais pas encore si des parcelles de potager sont au programme…On pourrait ainsi boucler la boucle en quelque sorte.

L’usine de Bülach avec devant les parcelles de potagers pour les ouvriers (1924),
source: buelachansichtskarten.ch

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Aujourd’hui, le bocal en verre, symbole impeccable de transparence et de vertu écologique fait son grand retour. Les aficionados du zero-waste, du fait-maison, de la lacto-fermentation, de la stérilisation sont de plus en plus nombreux. Les achats en vrac, les plats servis en bocal, l’esthétique vintage, tout y est pour créer un trend. L’allemand Weck, l’américain Ball Mason Jar et le français Le Parfait se partagent un marché en pleine expansion et notre joli bocal national a disparu au point de devenir en quelques années introuvable même dans les brocantes… Je me souviens des étagères de la cave de ma grand-mère où étaient alignés bocaux de légumes et de fruits, bouteilles de sauce tomates et confitures, promesses de délices à venir. Certain-es se rappellent d’en avoir balancé dans les bennes à verre de la déchèterie, faute de leur trouver un usage. Quel drame !

bocaux Bülach
Bocaux, 1948 (musée suisse du design Zürich)

Aujourd’hui, je conserve en bocaux une partie de la production de mon potager pour en retrouver les saveurs en plein mois de février. Le congélateur est nettement moins poétique, plus électrique et j’adore voir ces rangées rassurantes de bocaux. Ouvrir un bocal en tirant la languette de caoutchouc et d’entendre le petit pfuit de l’air a quelque chose d’immémorial (même si ce n’est qu’un siècle…).

Bon, vous l’avez compris, si vous avez des bocaux Bülach dont vous ne savez que faire, faites-moi signe !!

Source: buelachansichtskarten.ch

Gazon maudit

Et pelouses honnies! Je n’ai pas encore digéré la défaite mortifiante de notre Roger national sur le gazon de Wimbledon dimanche passé. Mais, malgré tout, je pardonne au gazon britannique grâce aux 8 autres victoires de Federer sur cette surface. Et j’adore aussi les fraises et le champagne.. mais pas ensemble !

Tentons quand même d’élargir le propos: Quelle est cette passion des homo sapiens pour les pelouses? D’où vient ce goût immodéré du vert rasé au millimètre ? On pourrait résumer en disant : rage guerrière, orgueil capitaliste et conformiste dépitant.

Il semble en effet que les premières pelouses, c’est à dire un espace d’herbe rase sans culture, soient nées de la peur de l’envahisseur. Au Moyen-Age, le seigneur en son château, appréciait de voir l’ennemi arriver au loin dans un panache de poussière, afin de préparer balistes et trébuchets pour assassiner en règle. Bon prince, quand il était pas en guerre contre ses voisins, il laissait ses prés à ses serfs, pour le bétail, qui en broutant, leur confère cet aspect ras (tondeuse et grandeur d’âme chrétienne réunies). Le mot pelouse vient d’ailleurs du latin “pilosus” et signifie “poilu”, sans doute pour rappeler la barbe ou autre pilosité. Le rasage, oeuvre civilisatrice, chez l’homme et la pelouse, repousse loin dans l’inconscient, le sauvage en nous. La pelouse, c’est en quelque sorte l’anti-forêt, un espace rassurant et maîtrisé ou l’homme ne risque rien, ni attaques de loups-garous ni agressions d’autres tribus, ni sa propre sauvagerie.

Dans les jardins du château de Versailles, conçus par André Le Nôtre, la grande allée du Roi est un espace gigantesque d’herbe tondue qui met en valeur la perspective et le château. Cette première pelouse d’apparat, tondue à la faux, par des armées de serviteurs, pour qui la garden party n’était même pas un concept, a certainement été source d’inspiration pour de nombreux autres jardins à la française. Cette étendue vierge de cultures est l’image même du pouvoir absolu du roi sur ses sujets, tondus par l’impôt et indistincts comme les brins d’herbe du gazon. Le jardinier de banlieue d’aujourd’hui ressent certainement sa propre royauté en dirigeant fièrement sa tondeuse autotractée ou mieux, juché sur son tracteur. Quoiqu’aujourd’hui on laisse faire cette tâche aux robots de tonte, esclaves mécaniques presque silencieux (et c’est là leur seul avantage) sans plaintes ni maux de dos.

Au 18ème, le jardin à la française se meurt, le style va cependant rapidement évoluer vers le jardin à l’anglaise fait de perspectives imaginées-imaginaires, créatrices de paysages. La pelouse prend le rôle de faire-valoir, car elle permet de créer et mettre en valeur des “vues” avec des bosquets, rivières et étangs ou de fausses ruines. Des vaches paissant complétant le paisible et romantique tableau. Outre du bétail, les aristocratiques anglais du 18-19ème employaient nombre jardiniers pour l’entretien de ces “faux paysages”. La pelouse est un signe extérieur de richesse qui affirme le fort capital économique de son propriétaire, qui n’est donc pas un paysan (oh, que non!), qui n’a pas besoin de rentabiliser son territoire et peut, entre deux réunions à la chambre des Lords, se plonger dans la contemplation métaphysique de la nature ou de l’évolution des cours de la bourse.

Avec l’arrivée des premières tondeuses mécaniques au milieu du 19ème siècle, l’Amérique s’empare de cette esthétique rassurante. L’après-guerre est la consécration de la mise en scène du confort économique du propriétaire de villa (automobile, machine à laver, etc.), à grand renforts de produits chimiques, car ce maudit gazon, stérile pour la biodiversité, ne pousse que si on le nourrit. L’étalement urbain, l’amélioration des niveaux de vie, le vieillissement de la population et l’augmentation du pouvoir économique des pays émergents promettent de beaux jours aux pelouses uniformes. Aujourd’hui, le chiffre d’affaires de l’entretien des gazons aux USA pèse 8 milliards de dollars, ce n’est pas négligeable et l’avenir est souriant. Regardez les publicités pour les semences, engrais ou tondeuses : elles promettent la félicité familiale dans un décor privatisé de golf, bordé de sages massifs floraux, un barbecue en fond, des enfants radieux jouant au ballon avec papa. C’est l’ennui incarné…

Une autre voie est possible, plus apaisée, moins pétaradante, plus variée, moins sage… mais aussi plus difficile: la praire fleurie, nouveau graal des bobos écolos (ce qui dans ma bouche n’est pas une injure, croyez-le!) et des nostalgiques des champs de leur enfance. La désaccoutumance au gazon passe par l’abandon des produits phytosanitaires, puis de l’arrosage automatique, la pratique du mulching, puis du grand saut vers la prairie fleurie, qui croyez-moi, n’est pas simple à obtenir. Nos terres, trop riches, doivent être mises au régime, il faut faucher 3-4 fois dans la saison, à la faux, ou à la débroussailleuse assourdissante, et alors, que faire de toute cette herbe qui arrive d’un coup ? Bref, joyeux sacerdoce en perspective, mais ô combien gratifiant, quand oiseaux, insectes, abeilles bien sûr, s’y installent complétant un tableau multicolore.

Si le tournoi de tennis de Wimbledon se jouait au milieu de coquelicots, scabieuses, sauges, esparcettes ou campanules, les jardiniers du All England Lawn Tennis Club, n’auraient sans doute pas moins de travail, ni d’angoisses. Mais moi, j’imagine la chemise impeccablement blanche de Roger Federer au milieu d’un champ multicolore d’ou l’on verrait émerger des services gagnants et reprises de volée majestueuses.

La belle amélanche

Un matin de juillet, la récolte, à la fraîche, des amélanches, est l’occasion d’une méditation sur la modestie et la promesse d’une tarte partagée ou de confitures goûteuses. L’amélanchier, voilà bien un hôte du jardin qui nous ravit en toutes saisons ! En avril, sa floraison précoce et abondante, en forme de petites étoiles blanches, annonce l’installation du printemps. Elle a l’élégance de ne pas s’attarder, forçant les laudateurs à s’arrêter pour l’admirer, avant qu’elle ne s’envole.

Puis début juillet, une luxuriance de petits fruits rouges violacés à la chair pâle, de la taille de petites myrtilles et au goût très sucré, ravit à la fois les oiseaux et les jardiniers qui se pressent tous deux pour en saisir les délices. Menues les amélanches, mais suaves, plantureuses… Vous en ferez des crèmes brûlées, clafoutis, tartes, confiture, à l’identique que avec des myrtilles ou autres petits fruits estivaux.

Et enfin, à l’automne, l’arbre se pare d’une flamboyante pourpre cuivrée pour un spectacle d’été indien. Nous ne sommes pas au Québec, mais parmi les arbres de nos jardins qui enchantent le mois octobre, l’amélanchier tient le beau rôle.

Pour profiter des dons de l’amélanchier, on peut le planter comme élément de haie vive ou, encore mieux, en sujet isolé ou devant des conifères par exemple. Pas pressé, il est idéal pour les petits jardins, car on peut le tailler raisonnablement. Si on lui laisse toutes les libertés, il peut aller jusqu’à 3-5 mètres. Il supporte les températures très froides mais n’aime pas trop la sécheresse quand elle dure (le bon réflexe: maintenir sa base au frais avec un paillage ou de la végétation peu taillée). La plupart des espèces sont originaires de l’Amérique du Nord et d’Asie, d’Europe pour une seule espèce (A. ovalis). Le plus répandu dans les jardineries est A. lamarckii, originaire du Canada, et ses amélanches sont tout aussi belles.

La belle amélanche est-elle sur le point de conquérir votre coeur ?

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